« Dans cet entretien, mère et fille tissent des liens étonnants entre gravité, aventure, jeu et danger, inconscience et courage »
La pièce se déroule lorsque Clara a 72/74ans, Florence a alors 42 ans. «Est-ce qu’il peut s’oublier, cet homme placé au centre de son univers et qui ne voit que son propre domaine ?» «Ne vaut-t-il pas mieux être ma femme qu’un écrivain de second ordre ?» «J’ai existé avant de vous connaître. … Je n’ai cessé d’exister que le jour où je vous ai accepté»
CLARA MALRAUX
Traductrice de Virginia Woolf, elle a vécu de 1897 à 1982. Résistante active de 1942 à 1944, elle finit sa vie au Moulin d’ANDE.
André son mari, un peu plus jeune qu’elle, né en 1901 il meurt en 1976, à l’âge de 75 ANS. Il a le Goncourt en 1933, et est Ministre à 60 ans. Florence naît en 1933 et meurt en octobre 2018. Elle épouse Alain Resnais en 1969, et se sépare en 1980. Elle soutient dans le manifeste des 121 l’insoumission des appelés d’Algérie et est en rupture avec son père André pendant 7 ans. En 2009, elle est présidente du CNC.
Clara Malraux et André Malraux
Avec André , j’ai tout connu sauf l’ennui
Clara a dû lentement apprendre à se défaire de lui (« une intoxication plus grave que celle de l’opium ») et à « cesser de vivre par procuration ». Sa flamme créatrice se remit peu à peu à vibrer. Elle ressentit son divorce comme la permission d’écrire. Elle ne cessa plus de le faire.
Collaboratrice de différentes revues et romancière, elle a publié une quinzaine de livres dont certains sont imprégnés de son expérience personnelle et d’autres traduisent son attachement à la terre d’Israël. Elle était aussi une traductrice très compétente : Virginia Woolf, Freud et Kafka ont pu bénéficier de sa plume.
On a dit que Malraux l’avait quittée quand il s’était senti suffisamment fort pour naviguer seul. C’est elle, en tout cas, qui lui a révélé la culture allemande, la sienne, et la peinture italienne qu’elle connaissait, au départ, mieux que lui. Et c’est auprès d’elle, qui était intellectuellement capable de le suivre, qu’il a pu roder les mécanismes de sa pensée avant d’aller la faire fructifier à l’extérieur.
Clara Malraux, dans sa jeunesse
Dans ses Mémoires, Clara Malraux (1897-1982) a longuement raconté ce que furent ses rapports avec son mari, André. Son témoignage est émouvant. Cette femme sensible et chaleureuse, en qui ses parents avaient mis de grands espoirs, s’est vue, en quelques années de vie commune avec ce personnage énigmatique, ambitieux et supérieurement intelligent, carrément dépossédée d’elle-même. Il lui fallut, pour se reconquérir, comme elle l’écrit, passer par un divorce et se retrouver seule.
Clara Goldschmidt rencontre à un dîner, chez des amis communs, un jeune homme de dix-neuf ans, grand, mince, qui fraye dans les milieux de l’édition. Peu bavard sur ses origines, il cache son enfance et le milieu qui l’a vu naître sous le voile épais d’une conversation brillante.
Le charme mystérieux qu’il dégage séduit la jeune esthète de 24 ans, qui veut s’engager dans une carrière d’écrivain. Elle n’est pas belle, elle le sait, mais elle a appris à compenser par la parole. Ils restent en contact, se revoient, puis décident de filer ensemble en Italie. Le mariage a lieu peu après, un peu malgré eux, pour respecter certaines convenances, avec promesse réciproque de liberté totale. Elle est subjuguée.
Au début, c’est son argent à elle qu’ils dépensent, car il n’est pas envisageable, comme il le dit, que quelqu’un de sa race aille vulgairement travailler. André Malraux avait une très haute idée de lui-même. Alors, ils vivent d’expédients. Un trafic de statues khmères en Indochine tourne à la catastrophe.
Il faudra qu’elle intervienne énergiquement auprès de ses amis influents pour le tirer d’embarras. Entre-temps, il engrange : toute cette expérience sera exprimée plus tard, enjolivée, sous forme de romans – La voie royale, La condition humaine – qui en feront un des écrivains français les plus en vue du XXe siècle. Dans le couple, très vite, c’est lui qui prend le dessus :
« Tout entière comme une femme d’autrefois, je m’étais remise entre les mains de celui qui donnait une saveur merveilleuse à chacun de mes instants »
Ne finit-il pas, ce mythomane, par lui faire croire que cette réalité qu’il distord est plus vraie que nature ? N’est-ce pas cela, tout compte fait, que créer ? Clara, qui s’inventait, toute petite, des histoires à ne plus dormir, est prête à le suivre. Mais elle découvre peu à peu que ce compagnon, qui déjoue si bien les pièges de la monotonie, a aussi des défauts. C’est un nombriliste, incapable de s’ouvrir aux autres :
« Est-ce qu’il peut s’oublier, cet homme placé au centre de son univers et qui ne voit que son propre domaine ? »
Il lui dévoile aussi sa misogynie profonde et son mépris pour les œuvres des femmes. Elle remarque qu’il ne peut supporter d’être jugé par elles. Il attend de la sienne qu’elle soit suffisamment intelligente pour le suivre dans les voies sinueuses de ses idées mais pas trop ambitieuse, afin de lui laisser la première place :
« Ne vaut-il pas mieux être ma femme qu’un écrivain de second ordre ? »
Ne lui a-t-il pas promis qu’il serait un jour Gabriele d’Annunzio ? Mais bientôt, n’y tenant plus du “combat qu’[elle] menait contre lui pour [se] maintenir, pour ne pas devenir [son] écho, elle lui écrit Le livre des comptes dans lequel elle dévide tout son malaise :
« J’ai existé avant de vous connaître. Je n’ai cessé d’exister que le jour où je vous ai accepté. Vous. Tout entier. Et il ne me reste, pour être sûre que je suis moi-même, que le recours à moi, que de sentir ma continuité »
C’est un texte nostalgique et désabusé où chaque phrase traduit la perte de l’illusion de l’amour totalement partagé :
« Aimer une femme, pour un homme, c’est peut-être la vouloir semblable à l’image qu’il s’est fait d’elle. Aimer, pour une femme, c’est vouloir que l’homme choisi ressemble à l’image qu’il s’est fait de lui-même, et souvent, plus simplement encore, à être ce qu’il est»
Clara n’avait pas la vocation d’être cette épouse qu’il souhaitait à ses côtés, mais elle s’efforça de jouer ce rôle pendant plus de quinze ans. L’année où il remporte le prix Goncourt, en 1933, elle met au monde leur fille Florence. C’est significatif. L’enfant ne change rien à ses projets à lui. D’ailleurs, quand elle vient au monde, il a pratiquement déserté les lieux.
Séparée de lui pendant la guerre, Clara relate dans ses Mémoires comment, juive et résistante, elle erra, seule avec sa petite fille affamée, dans la France envahie, pendant que lui, avec un nouvel amour, Josette Clotis, vivait “planqué” sur la côte d’Azur. La rupture officielle eut lieu en 1947, alors qu’André venait de perdre dramatiquement sa maîtresse qui lui avait donné, contre son gré, deux fils qui moururent ensemble pendant leur adolescence.
Bien des livres ont été écrits sur Malraux. Le plus touchant est peut-être le témoignage de son fils adoptif (10), le fils de son frère, qui décrit, avec une tendre clairvoyance, ce “père” distant, emprisonné dans une carapace qui ne laissait plus échapper que le personnage public. Il obtint tous les honneurs qu’il avait visés : ministre de de Gaulle, écrivain célèbre. Mais sa vie personnelle resta exempte de cette chaleur qui attire, spontanément et sans calcul, les gens autour de soi.
Son fils raconte comment, un jour, il mit sa dernière femme à la porte, la femme de ce même frère qu’il avait épousée après sa mort, qui collabora à ses écrits sur l’art, et qui avait partagé (le mot est-il juste ?) sa vie pendant plus de vingt ans. Sa fin est triste : solitude, dépression. Madame de Staël a écrit : « La gloire est le deuil éclatant du bonheur ». Dans son cas, combien la belle phrase semble exacte.
FLORENCE MALRAUX
Femme d’Alain RESNAIS.
Au nombre de ses fidélités, il y eu bien sûr celle à Edgar Morin connu à l’époque de la guerre, de la Résistance. Elle traversa tous les dangers de la persécution nazie pour elle et sa mère parce qu’elles étaient «juives» pour les Allemands de cette époque. Elle se lia d’amitié avec Françoise Sagan, qu’elle a rencontrée à l’adolescence et dont elle fut l’une des plus proches amies, puis avec Jeanne Moreau.
Entre littérature et cinéma, l’une de ses rencontres les plus fortes fut indiscutablement celle avec Jorge Semprún (1923-2011), l’écrivain et scénariste franco-espagnol ou plus exactement hispano-français.
Le fait que Semprún fut d’abord résistant en France, puis déporté à Buchenwald, puis l’un des chefs du parti communiste espagnol en exil avant de devenir écrivain, scénariste et ministre de la culture du gouvernement de Felipe Gonzáles ne put que renforcer leur connivence, leur complicité indéfectible.
Certains se souviennent qu’en 1961, elle signa le Manifeste des 121, la « Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie ». De ce jour, son père rompit avec elle et ce ne fut qu’en 1972 qu’il la retrouva alors mariée à Alain Resnais, grâce sans doute, en partie, à l’intervention de Sophie de Vilmorin, devenue la compagne d’André Malraux jusqu’à sa mort.
Parmi ses fidélités, Florence garda la sienne à son cousin germain Alain, fils de Roland (mort en déportation) et de Madeleine Malraux.
Elle fut pour mon frère François de Saint-Cheron et pour moi-même une amie exceptionnelle – comme le fut Sophie de Vilmorin.
Florence Malraux fuyait les honneurs. Elle avait cette noblesse, cette grandeur d’esprit et de cœur, qui en faisait un être rare. Elle inspirait l’amour et le respect.
Le nazisme c’est mon enfance détruite.
La pièce : Clara MALRAUX, la rebelle
1976.
André Malraux, le génie, le Ministre de la Culture du Général de Gaulle, le prix Goncourt, va mourir. Et Clara l’aime encore et toujours. Malgré leur divorce et leurs divergences politiques.
«Au Moulin d’Andé où elle réside comme simple pensionnaire jusqu’en 1982, date de sa mort, elle reste vive, très intelligente, cultivée, admirée par une cohorte de jeunes artistes. Elle, la fille Goldschmidt, une famille bourgeoise juive d’Auteuil, elle, fragilisée et démunie, elle accepte sa condition modeste, seul l’amour pour André et pour Florence, leur fille, et l’amour de l’art lui importent. Florence lui rend visite régulièrement.
Clara, la première épouse de André Malraux, la maman de Florence, s’est sentie reniée comme femme et comme intellectuelle aux côtés de ce grand homme, et pourtant le prix Goncourt a écrit ses plus belles œuvres quand elle était à ses côtés.
Rebelle, elle l’est, grande résistante pendant la guerre surtout et écrivaine très fine qui a laissé de nombreux ouvrages. Florence à l’écoute est parfois en révolte contre le caractère possessif de sa mère, son histoire d’amour avec André Malraux et la grande histoire de France.
« Le nazisme, c’est mon enfance détruite » dira plus tard la fille d’André et Clara, emmenée sur les routes de France bombardées. Florence est aussi une femme admirable, coscénariste, Présidente de l’Avance sur recettes au cinéma, s’est fâchée de longues années avec André, son père, avant de le retrouver avec bonheur.
Cette pièce est une longue attente tendue par un événement important. Les deux femmes se livrent et s’affrontent parfois, un duo haut en couleurs de deux fortes personnalités, l’une baroque, Clara, l’autre, apparemment en retrait, Florence.
« Clara Malraux la rebelle » cette pièce va intéresser petits et grands par la traversée de la Grande Histoire du 20ème Siècle et de celle, plus intime, de la famille Malraux.
Bérengère DAUTUN et Nathalie SAVALLI, les comédiennes
Bérengère Dautun, de son vrai nom Bérengère Marie Gaubens Dautun Cabrol, est une actrice française, pensionnaire de la Comédie-Française en 1964, puis sociétaire de 1972 à 1997.
Elle a reçu le premier prix au Conservatoire national d’art dramatique de Paris en juillet 1961.
Elle a été promue commandeur des Arts et Lettres en 1998 sur proposition de Catherine Trautmann, ministre de la Culture et officier de la Légion d’honneur le 30 janvier 2008 sur proposition de la ministre de la Culture Christine Albanel.
Elle a créé en 2009 sa propre compagnie, Titan-Bérengère Dautun.
La danse et le cours Simon préparent la comédienne au Conservatoire (classe de René Simon), dont elle sort avec un premier prix de Comédie classique.
Elle est engagée en 1964, à la Comédie-Française, où sa voix grave, très timbrée, l’oriente d’abord vers les grands rôles cornéliens : Émilie (Cinna), Pauline (Polyeucte), Rodogune, l’Infante (Le Cid)… mais elle interprète aussi, dans un registre plus tempéré, Atalide (Bajazet de Racine) ou Hermia (Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare), ainsi que le grand répertoire de comédie : Molière, avec Isabelle (L’École des maris), Armande (Les Femmes savantes), Élise (L’Avare), Aglante (La Princesse d’Elide) et les rôles dits de caractère, comme Béline et Arsinoé ; Marivaux, avec Hortense (Le Legs), Araminte (Les Acteurs de bonne foi). Dans le registre comique, elle joue Nina Letrinquier (La Station Champbaudet, de Labiche), Eugénie (La Puce à l’oreille, de Feydeau)
Très à l’aise dans le répertoire moderne contemporain, elle crée, entre autres, Noune (Le Montreur d’Andrée Chédid), Édith (Le Songe de Strindberg), la Reine (Becket de Jean Anouilh), l’Antigone de Brecht, Sandra dans Maître Puntila et son valet Matti, Amélia de la Maison de Bernarda Alba de F. García Lorca, Alisa dans La Célestine d’après Rojas, Achi dans Dave au bord de mer de René Kalisky, Caroline Blache dans L’Émission de télévision de Michel Vinaver.
Elle a également interprété F2 dans Le Silence de Nathalie Sarraute, pour la réouverture du Théâtre du Vieux-Colombier en 1993.
À la télévision, pour laquelle elle a tourné beaucoup, elle a notamment incarné une émouvante Eugénie Grandet. Depuis son départ de la Comédie-Française, en 1998, elle se produit régulièrement sur diverses scènes théâtrales.
On peut citer quelques-uns des derniers succès de de Berengère DAUTUN au théâtre, notamment :
- “Les coquelicots des tranchées «qui a obtenu le Molière du meilleur spectacle en 2015
- “Comtesse de Ségur née Rostopchine en 2016
-”je l’appelais Monsieur Cocteau”, “Le choix de Gabrielle” en 2019
Berengère DAUTUN est aussi l’Auteur de “Cantate pour Lou Von Salomé” et de “La Dame céleste et le diable délicat «d’après le livre de Claude-Alain Planchon qu’elle reprend bientôt dans son théâtre du Studio Hébertot dont elle est la directrice.
Nathalie Savalli passe son enfance et adolescence en Tunisie pour venir ensuite s’installer dans le sud de la France après la disparition de son père.
C’est là qu’elle s’épanouit grâce au théâtre aux côtés de Gérard Gélas au Théâtre du Chêne Noir.
Elle monte ensuite à Paris afin d’y poursuivre sa formation théâtrale au cours Florent, dont elle est diplômée.
Depuis, elle a collaboré avec différents metteurs en scène, tels que Jean-Paul Zennacker, Geneviève de Kermabon, Olivier Nolin, Catherine Hubeau ou, plus récemment, Urzsula Mikos pour le spectacle ‘Hamlet’ présenté au CDN de Montreuil dans le cadre du marathon Shakespeare.
Elle a également travaillé pour le cinéma, notamment sous la direction de Coline Serreau, dans ’18 ans après’.
Nathalie présente actuellement à son initiative une lecture-spectacle autour des « Lettres à Anne » de François Mitterrand.
Une lecture théâtralisée aura lieu le lundi 25 octobre 2021 à 20h30.
Lieu : Auditorium de la Maison des Auteurs de la SACD, 7 rue Ballu 75009 Paris.
Entrée sur INVITATION avec réservation obligatoire : evenm.contact@gmail.com
A propos de Betty Hania, auteure
Betty Hania est romancière, auteure de pièces de théâtre et essayiste.
Elle a publié deux romans dont « l’Obsédée » (BNE Editions) et « le Goût d’un ailleurs » (2018).
Et récemment « Toi en automne moi en hiver ou presque »
Par ailleurs, ses pièces de théâtre ont été mises en espace à Paris en 2016 au théâtre Chapelle Saint-Bernard (« Bon anniv ») et à Avignon à l’Espace Alya en 2015 (« Rancoeurs ») 2018 « Clara Malraux la rebelle »).
Elles sont parues aux éditions Lever de Plume (« Rancoeurs »), chez L’Harmattan (« Variations théâtrales ») et ses deux essais aux Editions du Félin (« Voyage au cœur de la France en crise »).
A propos de Norbert Mouyal, metteur en scène
Norbert Mouyal est créateur du Salon Solutions Ressources Humaines où il est toujours responsable de la programmation des conférences de cet événement. En parallèle, après avoir exercé 15 ans comme comédien, il est devenu auteur et metteur en scène de théâtre.
En parallèle de Clara Malraux la rebelle, EveN.M propose L’histoire de Nelly dans Bien Naître au Travail, une pièce sur « l’épuisement professionnel », écrite et mise en scène par Norbert MOUYAL, interprétée par Myriam ALLAIS et Anne-Sophie GARRIGUES.
La pièce le Bien Naître au Travail lève le tabou du burn-out en entreprise et livre les clés d’une prévention efficace. Le théâtre est envisagé tel un outil de prévention des risques psycho-sociaux.
La pièce, le Bien Naître au Travail aura lieu les mardis 16, 23 et 30 novembre 2021 à 21h au Théâtre Darius Milhaud Paris 19ème.
Une date est également prévue à GENEVE le jeudi 11 novembre 2021.
Pour en savoir plus sur la pièce « Bien Naître au Travail »
Site web : https://www.leburnoutparletheatre.com/
Facebook : https://www.facebook.com/pg/burnoutheatre/events/