Emploi des seniors : des propositions concrètes pour répondre à cette urgence sociale par Thierry Legrand-Browaëys, expert en gestion des Ressources Humaines

Alors que le gouvernement engage une nouvelle réforme de l’assurance chômage, la question de l’emploi des seniors revient au premier plan.

Des accords interprofessionnels conclus le 23 avril dernier devraient d’ailleurs inspirer un projet de loi sur le travail prévu à l’automne (source). Ils prévoient notamment la création d’un compte épargne temps universel et la facilitation des reconversions professionnelles.

L’objectif est d’agir vite pour éviter la précarisation des seniors. La ministre du Travail Catherine Vautrin reconnaît notamment que seulement 33 % des 60-64 ans sont en emploi. Quels que soient les chiffres retenus, un constat s’impose : la France fait partie des plus mauvais élèves de l’OCDE en ce qui concerne l’emploi des 55-64 ans (source).

Pourtant, cette situation n’est pas une fatalité.

Praticien de la gestion des ressources humaines depuis de nombreuses années et auteur reconnu de livres et d’articles, Thierry Legrand-Browaëys est convaincu qu’il est fondamental d’humaniser la gestion des carrières et de valoriser les compétences. À commencer par celles des salariés les plus seniors, qui sont les plus expérimentés.

“À travers les politiques de formation, de qualité de vie au travail et de gestion des carrières, il est possible de maintenir plus longtemps les Françaises et les Français dans l’emploi”, souligne-t-il.

Zoom sur ses propositions très concrètes pour répondre à l’urgence sociale que représente l’emploi des seniors. 

20240311161400-p1-document-luyg

La priorité est désormais de faire évoluer les pratiques de gestion des ressources humaines, notamment les stratégies de recrutement, pour que les entreprises soient moins réticentes à embaucher et à intégrer des seniors.

Travailler plus longtemps : oui, mais seulement si les seniors ont accès à l’emploi

En 2023, la réforme des retraites a imposé un recul de l’âge légal de départ. S’il est nécessaire d’adapter la législation aux évolutions démographiques et, en particulier, au vieillissement de la population, le fait de demander aux Françaises et aux Français de travailler plus longtemps pose un grave problème.

“Depuis plusieurs décennies, les entreprises ont pris l’habitude d’écourter les carrières de leurs collaborateurs et de licencier les plus âgés de leurs salariés dès qu’elles ont besoin de se restructurer”, explique Thierry Legrand-Browaëys (voir son article dans Le Monde).

Initiée dès le milieu des années 1960, la stratégie française visait initialement à “faire de la place aux jeunes”. Elle n’a fait que précariser les seniors et accélérer l’entrée dans l’ère du chômage de masse. Aujourd’hui encore, près d’un salarié sur deux termine sa carrière en n’étant plus en poste.

Dans ce contexte, l’augmentation de la durée de la vie professionnelle exige une évolution importante des pratiques de gestion des ressources humaines.

Dans un marché du travail moins avantageux pour elles, les entreprises ne vont plus forcément pouvoir se passer des compétences des seniors. En conséquence, elles ont intérêt à améliorer la gestion des fins de carrière en mobilisant davantage la formation professionnelle et en réduisant le plus possible l’exposition aux facteurs de pénibilité.

Des propositions pour faire reculer les préjugés et les discriminations

Pour combattre la marginalisation dont les seniors sont victimes sur le marché du travail, il est d’abord impératif que les partenaires sociaux reprennent la négociation interprofessionnelle sur l’emploi qui a été engagée ces derniers mois.

En référence à différents rapports et à des propositions passées, il peut être envisagé :

  • de redynamiser la politique de l’emploi par la création d’un “CDI senior” ;
  • d’imposer aux entreprises le suivi d’un “index senior” ;
  • de préparer les reconversions en recourant davantage à la formation professionnelle ;
  • d’adapter la charge de travail et le niveau de responsabilité des salariés âgés ;
  • de faciliter le recours au temps partiel et à la retraite progressive ;
  • de prévenir l’usure professionnelle en incitant à investir dans l’amélioration des conditions de travail.

À propos de Thierry  Legrand-Browaëys

Diplômé de l’EMLyon Business School et de Sciences Po, Thierry Legrand-Browaëys a exercé des fonctions de gestion des ressources humaines dans plusieurs entreprises multinationales. Il travaille actuellement dans le secteur des services de sécurité.

En parallèle, il est contributeur à Cadre & Dirigeant Magazine (exemples : ici et ici) et à Économie Matin (exemple). Il est aussi auteur de deux livres : Formation professionnelle : comment en sommes-nous arrivés là ? (Edilivre, 2019) et Réformer les retraites, une crispation française (L’Harmattan, 2022).

Zoom sur les livres déjà publiés

Réformer les retraites, une crispation française

Reformer-les-retraites-une-crispation-francaise

À partir du 5 décembre 2019, l’ampleur de la mobilisation contre un projet de réforme systémique est venue rappeler à Emmanuel Macron et aux membres du gouvernement combien les Français sont attachés aux conditions dans lesquelles ils peuvent partir à la retraite.

Lorsque vient le moment de quitter la vie professionnelle, nos concitoyens se voient toutefois appliquer des conditions différentes en fonction du secteur d’activité dans lequel ils ont fait carrière et des facteurs de pénibilité auxquels ils ont été exposés. Ces différences s’expliquent par l’accumulation des législations applicables depuis maintenant plusieurs siècles.

Parce qu’il est devenu un acquis social d’une importance majeure, le droit à la retraite ne peut être réformé sans de réels efforts de négociation et de pédagogie.

Formation professionnelle : Comment en sommes-nous arrivés là ?

Formation-profeionnelle

Compte personnel de formation, compte personnel d’activité, entretien professionnel, conseil en évolution professionnelle, validation des acquis de l’expérience, projet de transition professionnelle, plan de développement des compétences, mise en situation en milieu professionnel, accès à l’apprentissage : de la loi du 16 juillet 1971 initiée par Jacques Delors à la liberté de choisir son avenir professionnel prônée en 2018 par Muriel Pénicaud, les différents gouvernements ont procédé à des réformes qui ont multiplié les dispositifs et complexifié les circuits de financement.

En quoi ces dispositifs consistent-ils ? À quoi servent-ils ? Sont-ils efficaces ? C’est à ces questions que Thierry Legrand-Browaëys cherche à répondre dans ce livre.

En savoir plus

Commander les livres :

Twitter : https://twitter.com/Thie_Legrand

LinkedIn : https://www.linkedin.com/in/thierry-legrand-19855047

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>