Qui pourrait accepter de travailler de 6 mois à deux ans sans que cela soit comptabilisé dans le calcul de sa retraite ?
C’est pourtant ce qui arrive à tous ceux et celles qui ont effectué des TUC (travaux d’utilité collective), ces “emplois jeunes” mis en place de 1984 à 1990 pour lutter contre le chômage.
Le problème ? Comme les “TUCistes” étaient considérés comme des stagiaires de la formation professionnelle, l’État assumait leur protection sociale et cotisait pour eux à la retraite… mais pas suffisamment.
Le montant des cotisations versées, beaucoup trop faible, n’a pas permis de valider un seul trimestre pour la retraite pour une année entière d’activité. De plus, l’État n’a payé aucune cotisation à un régime de retraite complémentaire.
Or personne n’avait prévenu les générations concernées ! Maintenant qu’elles se rapprochent de la retraite, elles découvrent que les TUC ne leur ont ouvert aucun droit.
Pour lutter contre cette injustice, l’association “TUC, les oubliés de la retraite” se mobilise pour récupérer les trimestres cotisés manquants.
Leurs différentes actions auprès des pouvoirs publics ont notamment permis de modifier en partie cette situation via la réforme des retraites de 2023. Mais une inégalité criante demeure : les TUC ne sont pas encore pris en compte pour les carrières longues.
Plus d’un million de personnes ont signé un TUC ou un dispositif comparable
Depuis plus de 15 ans, des députés et des citoyens interpellent les gouvernements successifs sur la situation particulière des TUC. En 2021, une pétition sur Change.org initiée par l’association “TUC, les oubliés de la retraite” va également récolter plus de 4000 signatures.
L’année suivante, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale finit par s’emparer du sujet en lançant une mission “flash” sur leurs droits à la retraite. Elle va d’ailleurs révéler que près de 1,7 million de contrats TUC qui ont été conclus sur toute la durée d’existence du dispositif par plus de 1 million de personnes.
La mission préconise « que les périodes effectuées dans le cadre de stages Tuc et dispositifs comparables soient réputées cotisées au sens de l’article L. 351-1-1 du code de la sécurité sociale ».
Le ministre du Travail de l’époque, Olivier Dussopt, exprime aussi son souhait de réparer cette erreur du passé.
Le cas particulier des carrières longues : malgré les promesses, les TUC sont encore oubliés
En juillet 2023, trois représentants de l’association sont reçus au ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue Social. Plusieurs sujets sont abordés, parfois très techniques.
À ce moment-là, le Gouvernement précise : ” Les TUC et autres contrats aidés seront éligibles à la carrière longue dans les dispositions existantes de ce régime spécifique en tant que trimestres validés.” Les assurés concernés pourraient ainsi bénéficier d’un départ à la retraite avant 64 ans.
Pourtant, en septembre, le décret et sa circulaire opèrent un revirement : les bénéficiaires du dispositif carrière longue ne pourront pas intégrer leurs TUC dans les trimestres nécessaires à leur génération, puisqu’ils sont réputés “assimilés” et non “cotisés”.
Face au silence de l’État français, une action en justice va être lancée
Si le problème des TUC a bien été reconnu comme une injustice par le Gouvernement, il n’a malheureusement été réparé qu’à moitié par les décrets liés à la réforme de la retraite.
Malgré tout, l’association a continué jusqu’au bout à privilégier la concertation et les échanges constructifs. En octobre dernier, elle a notamment interpellé le député Arthur Delaporte pour l’alerter que les prérogatives de la Mission Flash, qu’il avait initiée avec M. Paul Christophe, n’ont pas été respectées.
Il est intervenu auprès du Ministère et a posé, avec l’aide de 4 autres collègues de son groupe politique, une question à ce sujet. Car la position du Gouvernement va à l’encontre des demandes du Parlement et même du rapport sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.
Le député précise notamment : “Il est important que la réparation de cette injustice n’ouvre pas d’autres injustices pour ces femmes et ces hommes ayant participé à ces dispositifs et qui sont aujourd’hui lourdement pénalisés, une fois encore.”
Mais, à ce jour, le ministère du Travail n’a pas encore répondu…
La majorité des adhérents de l’association a donc voté pour porter cette affaire devant la justice pour récupérer les trimestres manquants qui leur sont dus.
À propos de l’association “TUC, les oubliés de la retraite”
À ce jour, l’association compte 525 primo-adhérents en 2022 et 683 en 2023 et 700 adhérents en 2024 (y compris renouvellements) prêts à ester l’État en justice.
Un positionnement qui fait écho à sa mission qui est de “fournir aide et assistance, amiable ou en justice, aux personnes ayant bénéficié de tout contrat aidé, notamment de contrats T.U.C. (travaux d’utilité collective), de contrat Jeunes Volontaires, proposés par l’État français pour lesquels les trimestres travaillés n’ont pas été pris en compte au titre des cotisations retraite, leur occasionnant un préjudice important.”.
Les dates clés
Octobre 2020. Un groupe Facebook est créé pour échanger sur les déboires et les parcours de TUC, ainsi que sur la déconvenue à la vue de leur relevé de carrière. Au 22 juillet 2023, il regroupait 3548 membres. Ils sont plus de 4 700 aujourd’hui.
Janvier 2021. Une pétition est lancée sur Change.org. Au 21 juillet 2023, elle comptait 4160 signatures.
Janvier 2022. Création de l’association “TUC les oubliés de la retraite”.
Décembre 2023. La majorité des adhérents vote POUR l’action en justice.
En savoir plus
Dossier de presse : https://www.relations-publiques.pro/wp-content/uploads/pros/20240513071417-p2-document-rbyf.pdf
Site web : http://www.tuc-lesoublies.fr/
Facebook : https://www.facebook.com/groups/tuclesoublies/?locale=fr_FR